dimanche 21 juin 2009

Gros Plan : Le Lockheed Constellation



Lockheed Constellation : Le bel oiseau d’argent

Le Constellation de la firme Lockheed est sans conteste l’un des plus beau et des plus fins avions jamais construits. Sa ligne n’a d’ailleurs pas pris une ride et même en le comparant avec des géants du ciel comme le moderne Airbus A 380, le Constellation, né il y a plus de 65 ans, apparaît comme plus fluide, plus gracieux. Cet appareil évoque aussi la fin d’un règne, celui des avions multimoteurs à hélices, mais aussi le début des grandes lignes aériennes, les premières transatlantiques reliant les capitales européennes avec le Nouveau Monde. Ce n’est pas un hasard si les dernières variantes su Constellation terminent leur carrière alors que les premiers Boeing 707 à réaction entrent en service...


La firme Lockheed se développe durant l'entre-deux guerre en concevant de remarquables appareils civils. Lockheed est à la pointe du progrès durant les années trente et produit ainsi le Vega, un monomoteur très en avance sur son temps. Le Vega est suivi de l'Electra, un petit bimoteur lui aussi performant qui donner anaissance à une version militaire largement utilisée par les Britanniques, le Hudson. En 1939, le big boss de la compagnie aérienne TWA, Jack Frye, cherche un nouvel appareil capable de réaliser des vols transaméricains d'une seul traite, pour relier la côte ouest à la côte est voire même être capable de réaliser des vols transcontinentaux. Mais un autre homme a son mot à dire. Il s'agit du milliardaire et pilote Howard Hughes. L'homme possède depuis 1938 près de 25% de la TWA et a piloté un Lokheed Super Electra en 1938 lors d'un vol autour du monde très remarqué. Il aura un rôle non négligeable dans la conception du futur Constellation. En 1939, la TWA pose une option sur un appareil remarquable, le Boeing 307 Stratoliner qui possède une cabine préssurisée. Il peut donc voler en toute quiétude à très haute altitude, au-dessus des nuages, en s 'affranchissant ainsi des orages ou des mauvaises conditions météorologiques. La Stratoliner entre effectivement en service au printemps 1940 et effectue avec 33 passagers des vols New-York Los Angeles. Mais Jack Frye et Howard Hughes veulent plus : transporter au minium 40 passagers sur une distance de plus de 5600 km.


De l'Excalibur au Constellation
Lockheed a dans ses cartons le projet Excalibur, un quadrimoteur pressurisé, mais le cahier des charges des décideurs de la TWA excède les performances du projet. Les ingénieurs reprennent donc leur crayon et leur règle à calculer et assez rapidement est dévoilé le projet L-049 Constellation. Il s'agit d'un avion tout métal très soigné au niveau de l'aérodynamisme. Il est propulsé par quatre moteurs Wright R 3350 de 2200 ch et se distingue par un empennage tri-dérives (une seule mais haute dérive ne permettant en effet pas de rentrer l'avion dans les hangars des compagnies aériennes) et surtout par un train d'atterrissage tricycle, avec une roulette de nez à l'avant, chose très peu commune à l'époque. Les commandes sont asservie par un système hydraulique et le Lockheed dispose de volets hypersustentateurs Fowler, un dispositif mis au point par Harlan Davey Fowler et qui est constitué de volets se déployant au bord de fuite de l'aile (à l'arrière) afin d'augmenter la portance de l'aile au décollage ou à l'atterrissage, un dispositif toujours utilisé de nos jours. Nous sommes donc en présence d'un appareil très moderne, qui rompt totalement avec les anciens avions commerciaux. Sa vitesse de point est alors estimée à 550 km/h, c'est à peu de chose près, celle des chasseurs militaires entrés en service en 1939-1940. Son plafond maxi atteint les 7700 m et son autonomie est de 6400 km. L'équipage est composé de quatre hommes. Outre le trio classique des avions de l'époque (pilote, copilote et radio-naviguant), on note pour la première fois la présence d'un mécanicien naviguant qui dispose de son propre tableau de commande. Son rôle était déterminant car outre les moteurs, il contrôlait aussi le circuit hydraulique et électrique et celui de la pressurisation de l'appareil. berf, s'il ne gérait pas le vol à proprement parlé, il état directement responsable de toute la bonne marche de l'avion, un travail énorme...













Sous tous les cieux
Par certains aspects, le Constellation est très proche d'un appareil militaire en cours de développement, le Lockheed P-38 Lightning, qui a presque le même profil d'aile et un train d'atterrissage tricycle. La seconde guerre mondiale ralentit considérablement le vol du prototype du Constellation
qui doit patienter janvier 1943. Il porte à l'époque les couleurs de l'USAAF puisque, guerre oblige, il est destiné au transport de troupes ou de fret sur longues distances sous le nom de code C-69 (la terminologie "C" s'appliquant à "Carrier", avion de transport de l'armée, le fameux Douglas DC-3 étant ainsi nommé C-47 dans l'USAAF). Seuls 22 C-69 seront terminés en 1945 et la guerre se terminant, les militaires ne renouvellent pas leur commande. Mais pour l'usine Lockheed de Burbank en Californie, la véritable carrière du "Connie" (surnom donné au Constellation), ne fait que commencer ! Car l'avion semble prometteur. Il a en effet battu plusieurs records pendant le conflit. Le 17 avril 1944, Howard Hughes et Jack Frye relièrent ainsi Burbank à Washington D.C (3700 km) en 6 heures et 57 mn, à une vitesse de croisière de plus de 530 km/h. Malgré une chute spectaculaire des commandes militaires, la plupart des constructeurs qui ont déjà fabriquer des avions commerciaux savent très bien que l'avenir est à l'avion grand courrier. Lockheed envisage alors une commande d'au moins une centaine de Constellation et dès l'automne 1945, la TWA est en mesure de mettre en exploitation ses premiers "Connies". Un premier vol transatlantique est réalisé au début décembre 1945 entre Washington et Paris, mais il faut tout de même à l'avion deux escales pour traverser l'océan, la première à Gander (Terre-Neuve) et la seconde à Shannon (Irlande). La ligne commerciale est officiellement mise en service début 1946 avec un Constellation baptisé Star of Paris mais il s'agit d'un appareil de la Pan Am. l'avion est aussi choisi en 1946 par les compagnies American Overseas, par Air France et par la BOAC. Le Constellation entre aussi en service dans le Pacifique mais il doit là aussi faire des escales à Hawaï ou sur des îles transformées durant la guerre en porte-avions naturels telles Guam ou Wake. Il faut aussi à noter que les moteurs connurent quelques soucis, occasionnant d'ailleurs la perte de plusieurs appareils. Les Wright ayant parfois tendance à prendre feu et ces accidents clouèrent au sol les Constellation pendant six semaines jusqu'à ce que la cause de ces problèmes fut élucidée.


Toujours plus !
Les premiers vraies Constellation civils (les premières séries sont des C-69 déclassés par les militaires et qui reçurent la dénomination L049) sont les L649. Plus lourds, plus puissants que les L049 (les moteurs développent 2500 ch), ils sont aussi plus luxueusement traités à l'intérieur, avec une insonorisation renforcée et un équipement rendant la vie à bord plus confortable. Ces avions pouvaient être muni d'une soute à bagages amovible, le Speedpack qui se fixait sous le ventre de l'appareil et facilitait le chargement et le déchargement du fret. Ces modèles sont ensuite équipés de réservoirs supplémentaires dans les ailes pour accroître leur autonomie avant qu'une version L749 soit dévoilée. Celle-ci disposait encore de davantage de carburant lui permettant de voler sur 1550 km supplémentaires, le but étant à cahque fois de réduire le nombre d'escales. Mais plus de carburant allourdit l'avion et les moteurs atteignent désormais 2700 ch. C'est ce modèle qui équipa essentiellement Air France qui exploita au total 28 appareils. En 1950 apparaît le Super Constellation : plus long de 5,59 m, avec un fuselage de section constante muni de hublots carrés, nettement plus lourd (près de 54,4 t contre 42,6 t), ce L1049 va un peu moins vite (malgré des moteurs de 2800 ch), monte moins vite aussi mais son autonomie frise les 7700 km. L'adoption de moteurs Wright Turbocompound permet de faire ensuite passer la puissance de chacun des quatre moteurs à 3200 ch (puis 3400 ch) sur le L1049G alias "Super G", reconnaissable à ses réservoirs fuselés en bout d'ailes. Le Super Constellation fut la version la plus produite avec 578 exemplaires assemblés sur les 856 Constellation construits. Lla dernière version est le superbe L1649 qui mit un terme aux escales lors des vols transocéanique. Ce L1649 Starliner (ou Jetstream chez la TWA) apparut en 1956. La voilure, amincie et allongée, avait été redessinée pour améliorer le rendement des moteurs et offrir une capacité en carburant encore plus grande. Le nez fut doté d'un radar météo. La vitesse de croisière avec les moteurs turbocompound s'établissait désormais à 550 km/h et l'avion pouvait parcourir... 10000 km. Deux fois plus que le tout premier Constellation ! Mais le temps des hélices semblait révolu. Lorsque Air France mit en service ses Starliner (la compagnie en utilisa 10), les premiers Douglas DC-8 et Boeing 707 venaient d'entrer en service. Le Starliner est sans doute le plus abouti des avions de transport à hélices mais sa carrière fut extrêmement courte (44 exemplaires au total), certaines compagnies ne les mettant en service que quelques semaines ! Le Constellation et ses dérivés continuèrent toutefois à voler, mais sous l'uniforme. Bon nombre d'entre-eux ont en effet servi d'avions de surveillance électronique ou de reconnaissance au sein de l'armée de l'air Us ou de la Navy et ce jusqu'au début des années 1980. Mais il s'agit là d'une autre histoire...

Le Lockheed Starliner codé F-BHBK d'Air France - baptisé "La Fayette" - , représenté ici sur cette publicité, fut mis en service en juillet 1957 et retiré ... trois mois plus tard, supplanté par le Boeing 707. Le starliner pouvait traverser l'Atlantique d'une seule traite mais surtout, il rendait près de 400 km/h au moderne jet de Boeing...

Texte : Francis Dréer, Photos et archives BigBlock